Appel à proposition : Colloque "S’engager dans les espaces publics : participation politique et engagements multiples"
5
avril 2012 - et 6 avril 2012, au CERI- Sciences Po (Centre d’Etudes et
de Recherches Internationales), au 56 rue Jacob (Paris 6e)
Calendrier
- 30 septembre 2011 : date limite d’envoi des propositions
- 15 octobre 2011 : arrêt de la liste des participants
- 15 février 2012 : remise des textes
Présentation scientifique
Ce colloque est organisé dans le cadre du projet « Processus et
acteurs latino-américains de la participation politique » financé par
l’Agence nationale de la recherche (ANR) et par l’Institut de recherche
du développement (IRD). Ce projet a analysé les formes diverses de la
participation politique tant dans des expressions contestataires que
dans des arènes de démocratie participative, et interrogé les
articulations entre acteurs engagés, structures d’encadrement et de
mobilisation (partis, associations) et pouvoirs publics, dans une
perspective comparée.
Au cours de deux journées de travail, on s’interrogera sur la
pluralité des espaces publics en démocratie, au-delà des cas
latino-américains. Plutôt que de discuter la qualité de la démocratie,
on observera les manières dont les formes de participations se
structurent, s’inscrivent dans des relations de pouvoir spatialisées et
éventuellement les modifient, notamment dans les interactions avec les
autorités, que ce soit pour prendre part à la prise de décision ou pour
contester. Pour enrichir les débats contemporains sur les
renouvellements de la démocratie, il parait donc pertinent de
comprendre la participation comme un ensemble de comportements
politiques ancrés dans des espaces multiples. L’espace est entendu ici
à la fois comme les lieux physiques de la mobilisation et de la
participation mais aussi comme les ensembles sociaux et politiques dans
lesquels s’inscrivent les individus. De ce fait ces espaces sont
dessinés à la fois par les positions multiples des individus et des
groupes ainsi que par les formes d’encadrement social et politique.
A partir d’une approche empirique des terrains, les travaux
présentés dans ce colloque exploreront l’hypothèse d’un continuum des
comportements de participation, de la contestation aux institutions
participatives en passant par les syndicats et les partis. C’est donc
la circulation des groupes et des individus engagés d’une arène et d’un
espace à l’autre qui est ici au cœur du questionnement sur la
participation. Observer les mobilités et le multi-engagement renvoie à
des enjeux présents dans le débat scientifique contemporain, autour de
questionnements portant sur :

les
processus d’ouverture des espaces publics à des groupes sociaux et
politiques peu participants, ainsi que sur les effets –réels ou
attendus- de politisation des politiques participatives ;

l’inscription de l’espace du mouvement social dans une continuité avec celui des institutions politiques ;

la différenciation des formes de sociabilité militante et de participation politique selon les groupes sociaux et les lieux ;

les
transformations du militantisme, avec la raréfaction de la figure du
militant engagé permanent et de l’institution totale, au profit d’un
militant plus intermittent, multi-engagé, aux appartenances et
pratiques multiples.
Jusqu’à présent, la majorité des travaux sur les espaces publics qui
ont interrogé le rapport entre participation, mouvements sociaux et
démocratie, ont approché la participation, d’une part comme une valeur
et un « impératif catégorique » (Memmi 1985), d’autre part comme un
instrument pensé pour approfondir ou renouveler la démocratie de façon
radicale (FungWright 2003 ; Fung 2004 ; Goldfrank 2007 ; Wampler 2008 ;
Van Cott 2008). Pour ce qui concerne les mouvements sociaux, les
approches en termes d’organisations, de répertoires d’action collective
et d’interactions avec les autorités (TillyTarrow 2008) ont permis
depuis longtemps de dépasser des perspectives mettant l’accent sur
l’ouverture de l’espace public et sur les changements culturels
(Touraine 1985 ; Dagnino 2007 ; DagninoTatagiba 2010). Cependant, si
ces approches se sont intéressées aux formes d’occupation de l’espace
public à travers l’analyse des répertoires d’action, elles ont passé
sous silence l’articulation entre, d’une part, la présence des groupes
dans les lieux publics et, de l’autre, leur inscription dans différents
espaces sociaux et politiques.
Par ailleurs, les approches séquentielles des carrières militantes,
qui conçoivent la mobilité au sens social et professionnel
(MayerFillieule 2001), pourraient être enrichies par un regard précis
sur les mobilités géographiques. Il permettrait, en replaçant les
individus et les groupes dans leur ancrage spatial, de situer leurs
comportements de participation, donc d’en retrouver les logiques
concrètes. A l’exception notable de quelques travaux (
Mobilization
2003 ; Auyero 2001 ; Cahiers des Amériques latines 2011), la dimension
spatiale est encore peu présente de façon explicite dans les recherches
sur les mouvements sociaux. Elle l’est encore moins dans l’étude de la
participation au sens large, même si elle est prise en compte de façon
implicite dans les approches locales du politique, et notamment des
partis politiques.
Dans le cadre d’une sociologie politique de la participation,
l’espace peut être pensé comme opérateur de relations sociales, à la
fois dans sa dimension proprement physique mais aussi symbolique, et
dans une « relation double de potentialité et de contrainte », qui
façonne les mobilisations (Auyero, 2004 : 126) ; ce qui suppose
d’observer les sociabilités afférentes aux espaces, au sens où
« l’espace, en tant que cadre des actions sociales, agit d’abord comme
matrice structurelle de ces dernières » (Hmed, 2009 : 222 ;
Politix
2011). Ainsi l’espace ne sera-t-il pas abordé ici comme un simple
élément contextuel, ni même comme un environnement définissant des
ressources, mais plutôt comme un facteur de construction des relations
sociales, comme « médium et résultat de pratiques » (Hmed 2009) ;
pratiques tant de contrôle social et de domination que de participation
et de contestation. En ce sens, on considérera, avec Thomas Gieryn que
« les lieux ne constituent pas seulement un cadre ou un décor mais bien
un agent
(agentic player) dans le jeu – une force dotée d’effets
détectables » dans la vie sociale (Gieryn 2000 : 465). On observera
donc de quelles manières l’espace façonne les mobilisations et les
participations, tout en s’interrogeant sur leurs rapports réciproques.
Ces questionnements seront explorés suivant trois axes :
(1)- les espaces publics de participation et d’engagement et leurs structurations sociales
(2)- les mobilités et la circulation des individus
(3)- l’inscription de la participation dans les territoires.
Axe 1 :
Structuration sociale et militante des espaces de la participation
Cet axe interrogera l’articulation entre, d’une part, les formes
d’ancrage social de la participation, et en particulier le rôle des
organisations qui en sont à l’initiative, et d’autre part, les
pratiques d’encadrement et d’imposition de significations concurrentes,
tant par les pouvoirs publics que par des acteurs engagés.
L’ancrage social de la participation
Il s’agira ici d’analyser les processus de structuration sociale et
politique des espaces publics de participation, à partir de
l’observation : (a)- des différenciations sociales et politiques tant
des espaces publics de participation que des profils sociaux des
groupes qui habitent ces espaces publics ; (b)- des organisations qui
encadrent la participation en différents lieux (associations de
quartier, syndicats, voire associations de loisir ou encore groupes
informels d’amis, de voisins, mais aussi institutions du pouvoir local,
etc.) Ces observations renvoient à des interrogations sur les rapports
de domination sociale et politique au sein de ces espaces. Dans quelle
mesure les participations sont-elles structurées par l’existence
d’organisations multiples, identifiables dans des lieux qui leur sont
spécifiques, eux-mêmes marqués par des sociabilités propres ?
Processus d’encadrements et de domination
Pour observer les espaces publics de la participation et de la
contestation, une attention particulière peut être portée à
l’organisation matérielle de l’espace et à son marquage par différents
acteurs, tant les groupes militants que les autorités. Il s’agit donc
de porter attention à la structuration physique des espaces, à
l’ancrage local des réseaux de sociabilité qui rendent possibles les
mobilisations, ou encore aux lieux où l’action collective se diffuse,
tels que les foyers des travailleurs (Hmed, 2008), les mosquées
(Cattedra et Idrissi-Janati 2003), la rue (Bayat 1997), les cantines
populaires, les « chambrées » dans la France des années 1840 (Agulhon
1979), les salons de fête, etc. Le contrôle de l’espace, comme moyen
d’encadrer les participations peut constituer un enjeu de luttes
collectives, par exemple dans le cas des zones d’exclusion mises en
place lors de contre-sommets (Della Porta 2006), pour la surveillance
et la ségrégation, pour le contrôle social qui conditionne la
mobilisation ou sa dissidence ou encore comme ressource symbolique pour
les groupes mobilisés.
Axe 2
Mobilités militantes et circulations
Il s’agira d’observer les mobilités géographiques introduites par la
participation et de voir comment elles peuvent intervenir dans les
engagements, dans la structuration des univers militants et dans leur
différenciation.
Mobilités géographiques
Mener une sociologie des espaces publics suppose d’interroger la
façon dont ils se structurent sous l’effet de pratiques et
comportements de participation politique diversifiés, ainsi que sous
l’effet des circulations des militants dont les positionnements
organisationnels, souvent multiples, prennent sens dans des lieux. Pour
cela, l’analyse de l’inscription territoriale des participations permet
d’interroger les mobilités urbaines liées à l’engagement (Pujol 2010 ;
Merklen 2002), les mobilités sociales qui en découlent, ainsi que les
intermittences et les instabilités des engagements dans les espaces
publics (ruptures, retraits…).
Les multi-engagements
Les positionnements multiples des acteurs engagés se traduisent non
seulement par les circulations géographiques des individus et des
groupes, mais aussi par celles des savoir-faire et des ressources
auxquels ils ont recours. Plutôt que de penser le multi-engagement
comme une série de séquences successives dans une carrière militante ce
sont différents processus concomitants qui seront interrogés ici :
interactions entre les différents groupes d’appartenance, variations
des
ethos militants du même individu d’un groupe à l’autre et
d’un lieu à l’autre, reconversions de ressources, etc. (Poupeau-Matonti
2004). On s’interrogera donc sur la circulation des militants au sein
de différents espaces politiques, sociaux, professionnels, ainsi que
sur la façon dont les organisations d’action collective s’appuient sur
ces mobilités et sur la diversification des sociabilités militantes
locales.
Axe 3
L’inscription territoriale de la participation :
L’analyse des lieux dans lesquels mobilisations et participations
prennent place suppose de porter attention à leurs dimensions
physiques. On s’interrogera donc sur la façon dont les espaces, d’une
part, sont organisés voire encadrés en fonction des sens donnés à
l’action collective, d’autre part, interagissent avec les formes prises
par l’action collective.
Mises en scène et représentations mentales de l’espace
Les espaces publics de participation et de mobilisation prennent
existence dans une organisation physique des lieux de l’action
collective, qui peut relever de mises en scène, et qui repose le plus
souvent sur la mobilisation de symboles. A travers eux, les
représentations mentales des lieux, leur perception par les différents
acteurs, en disent long sur le sens donné à l’action collective, mais
aussi sur sa portée, sur les processus d’identification collective et
sur « les formes de ré-appropriation individuelles et collectives de
l’espace » (Hmed 2009 : 220 ;
Politix 2007), ou encore sur leur dimension symbolique (Irazábel 2006 ; López Gallegos et all. 2011) ou même magique (Shalins 1994).
Les répertoires d’action collective dans l’espace
Enfin, les lieux définissent à la fois des contraintes et des
ressources qui conditionnent la constitution des répertoires d’action :
assemblées dans des lieux fermés ou ouverts, manifestations,
campements, occupations de terrain ou de bâtiments publics, barrages de
routes, marches sur des centaines de kilomètres (RIPC 17(2) 2010). De
même, la topographie urbaine et ses transformations constituent un
facteur de structuration des répertoires (Gould 1997 ; Tartakowsky
2010 ; Traugott 2010).
Comité d’organisation :
Ce colloque est organisé dans le cadre du projet « Processus et
acteurs latino-américains de la participation politique », financé par
l’Agence nationale de la recherche (
ANR) et par l’Institut de recherche du développement (
IRD).
Les partenaires latino-américains de ce projet seront donc invités à
participer à ce colloque et à y présenter les recherches qu’ils ont
menées dans ce cadre. Les autres intervenants seront sélectionnés par
le comité d’organisation après réception de leurs propositions.
Envoi des propositions
Les propositions devront parvenir, par email, à l’ensemble des organisateurs avant le
30 septembre 2011 délai de rigueur. Chaque proposition comprendra : un titre, une présentation (5000 caractères maximum), une bibliographie.
Les textes seront rédigés en français, en espagnol ou en anglais.
Les langues de travail du colloque seront le français et l’espagnol.
Une traduction simultanée sera prévue.
Calendrier
Les auteurs seront informés de la décision du comité d’organisation avant le 15 octobre 2011.
Les intervenants dont les propositions auront été retenues devront
transmettre aux organisateurs le texte de leurs communications avant le
15 février 2012, délai de rigueur. Des indications
précises sur le format à suivre leur seront communiquées en même temps
que la liste définitive des participants.